De l’amour fait maison

26 Fév
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Crédits photo – Delphine Jung

Leurs histoires d’amour ressemblent à beaucoup d’autres: la rencontre, le mariage, les enfants. Ils passent désormais des jours paisibles en maison de retraite. Parfois dans la même chambre. Parfois séparés. Rencontre avec tous ces couples d’amoureux.

Aujourd’hui, Denise se rend à la maison de retraite de Mutzig. Elle va voir l’homme avec lequel elle a passé toute sa vie. Elle se souvient pour deux. François souffre d’Alzheimer. Il ne parle plus. « Il y a parfois quelque chose dans son regard, mais c’est très rare », explique Denise. Tous les deux jours environ, elle traverse Mutzig à pied pour le voir, s’assied à côté de lui et regarde la télé. Leur amour est devenu inconditionnel et surtout unilatéral. Denise aujourd’hui aime pour deux. De temps en temps, elle pose sur la joue de son mari le dis de sa main et le regarde avec une profonde tristesse. Lui reste immobile, les yeux perdus dans un vide intersidéral. La souffrance de Denise est palpable. Bien souvent, lorsqu’elle évoque certains de leurs souvenirs, elle a les larmes aux yeux. Mais elle reste forte.

Si les aléas de la vie et surtout la maladie ont déconnecté Denise et François, d’autres ont la chance de continuer à vivre leur relation dans une maison de retraite, certes, mais dans la même chambre, comme Hubert et Bernadette. Ils ont leur salon, et derrière, leur chambre. Les deux lits simples sont côte à côte. Sur l’un d’eux, une chemise de nuit traîne encore. « On voulait être ensemble », insiste Hubert.

Ernest et Marcelle aussi ont une chambre commune à la maison de retraite de Rothau. Leurs lits sont séparés par une petite table de nuit. « Nos problèmes de santé font que c’est plus pratique pour nous d’avoir chacun son lit, comme ça, on ne se dérange pas », explique Ernest. Mais vivre pleinement leur amour est devenu impossible. Marcelle a été victime de plusieurs AVC. Si elle se souvient de son mari, le reste ressemble à un paysage flou. Pourtant, quand une étrangère se trouve dans leur chambre, une question sort spontanément de sa bouche. Entre naïveté et un semblant d’angoisse, elle demande: « C’est une nouvelle copine? » Ernest sourit, lui prend la main et dit en souriant: « Après toutes ces années, elle est encore un peu jalouse. » Qu’elle ne s’y méprenne, Marcelle est bien le seul et unique grand amour d’Ernest.

Soixante-cinq années de mariage en témoignent: « J’espère pouvoir fêter les 70 ans avec elle! », lance-t-il. Dans un tiroir, il sort quelques coupures de presse qui retracent leurs longues années d’amour. Il en est aussi fier que de ses diplômes militaires accrochés au mur, juste à côté d’une photo de mariage en noir et blanc, jaunie par le temps. Il montre un petit arbuste posé sur leur table de nuit et dit: « Nous sommes heureux comme cet arbre. Je suis toujours conte de la voir en me réveillant le matin. »

Jeannine et Emile eux, ne se voient pas le matin au réveil. Ils sont pourtant dans la même maison de retraite, à Schirmeck. Un étage sépare leur chambre respectives…

D. Jung

La suite à lire dans les DNA du 14 février 2013 / pages locales de Molsheim-Obernai.

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